Les méfaits d'un monopole

 

 

Quelle déception !

Lorsque, le 24 mars 2014, la décision d'autorisation de mise sur le marché (AMM) était signifiée à Syngenta pour le "Revive®" Michel Ferry, chercheur à l'INRA, qui avait contribué par ses expertises à ce résultat qu'il attendait depuis plus de 2 ans, pensait qu'on allait enfin disposer du produit qui permettrait de sauver les palmiers. Le prix de vente sans remise de quantité du même produit aux USA sous l'appelation Tree-âge (utilisé contre l'agrile du frêne) était affiché sur internet. Il pouvait espérer qu'il soit vendu à moins de 20€ la dose pour 1 palmier. La méthode de traitement quand à elle était extrêmement simple : endothérapie à hauteur d'homme, pas besoin de nacelle pour les grands palmiers, possibilité de traiter facilement y compris en mileu urbain car le produit insecticide, confiné à l'intérieur du tronc du palmier, restait sans aucun contact avec l'environnement sur lequel son impact était jugé acceptable par l'ANSES. Le temps nécessaire pour faire 4 trous à 90° les uns des autres dans le palmier et injecter les 50ml de produit équitablement répartis ne dépasse pas 5 mn. Tous les espoirs étaient alors permis d'arriver à enrayer la prolifération du charançon en organisant une lutte collective, massive et coordonnée entre privés et publics en organisant des chantiers groupés. Cette lutte devait obligatoirement être limitée à 2 ou 3 ans maximum de manière à ne pas fragiliser les palmiers par des blessures répétitives, car le palmier ne cicatrise pas.

Mais au lieu de mettre le produit, pour lequel elle avait reçu une AMM, en vente auprès des professionnels agréés par les DRAAF, Syngenta conçoit une stratégie commerciale brillante et remarquable pour lui procurer une marge exceptionnelle, mais tout à fait contraire à l'intérêt général et à la sauvegarde des palmiers : elle se réserve la possibilité de choisir ses propres applicateurs, qu'elle contractualise et leur impose un prix de vente convenu pour le client final ! Certains professionnels ont flairé la bonne affaire, comment ? sur quels critères les professionnels sont-ils sélectionnés par Syngenta ?

Le traitement des palmiers par endothérapie selon la stratégie n°3 de l'arrêté ministériel du 21 juillet 2010 est ainsi monopolisé. Le prix public du traitement était encore de 258€ par palmier en 2015. Au lieu d'une lutte collective organisée, c'est une offre au coup par coup réservée aux plus fortunés, sans pour autant les informer que l'endothérapie n'est pas un traitement anodin et qu'ils ne pourront faire traiter leurs palmiers que quelques années! Une marge énorme pour Syngenta mais de l'argent versé dans le tonneau des Danaïdes pour ses clients! Car si après 3 années de traitements consécutifs, la population des charançons rouges n'a toujours pas régressée (ce qui est actuellement le cas, 2 ans après l'AMM) ils auront fait traiter leurs palmiers vainement au seul profit de la multinationale.

C'est ce que dénonçait le Canard enchaîné du 9 septembre 2015